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 Tous les cris, les S.O.S

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MessageSujet: Tous les cris, les S.O.S   Tous les cris, les S.O.S EmptyLun 11 Avr - 13:41

Tous les cris, les S.O.S Hollowart_jdtmr021 Tous les cris, les S.O.S _2bloc11
N i c o l a s & F l o r e n c e

« I woke up this morning baby
Mais ce matin t'as vraiment froid
Tu comprends du fond de ta poitrine
Tous les blues sont écrits pour toi. »
Céline Dion






En retard.
Nicolas avait beau détester cela, récriminer chaque facétie du destin, cela survenait, encore et toujours. Les regrets n’en étaient que plus violents, plus amers. Mais le temps perdu ne se rattrapant plus, l’espoir n’aurait su relever la tête.

Peu de chemin séparait l’Hôtel de Police, Rue Neuve-des-Capucines, de sa demeure. Lorsque la chance souriait aux cochers experts, le trajet prenait à peine un peu moins qu’une demi-heure. Cependant, il fallait un rien pour que les artères fortement usitées se retrouvent encombrées, les voitures stoppées, et l’horloge, devenue ennemie pernicieuse, effrénée au point de décompter les minutes avec une fougue que l’on aurait aimé stopper sans en avoir les moyens. Alors vous nous direz qu’il suffit de faire attention, de prendre garde à ne pas partir trop tard. Que de toute façon, tout ce qui ne serait pas réalisé le jour dit serait remis au lendemain, que ce ne serait pas plus mal. Que la vie passe avant tout, qu’il existe quantité de choses passionnantes à l’extérieur, dans les rues de Paris, chez soi, loin des besogneuses activités du jour. Que les êtres chers, les bons moments, toutes ces petites merveilles éphémères de la vie valaient la peine d’être vécues, bien plus que toutes les enquêtes, les rendez-vous ou les affaires en cours, et qu’il fallait se battre pour préserver son jardin secret, son petit monde où se reposer, où vivre, enfin. Gabriel ne l’ignorait point. Il avait œuvré afin de se concevoir, à bonne distance de son lieu de travail, un petit havre de paix idéale afin de se remettre des aléas quotidiens et goûter un peu de tranquillité. Mais rien n’ets aussi simple qu’il n’y paraît.

Quant le ministre en personne avait fait le déplacement jusqu’à la capitale, afin de l’entretenir dans les plus brefs délais des dernières dispositions du Roi quant à une opération massive menée contre la Cour des Miracles, il avait oublié que la soirée commençait déjà à être bien avancée. La discussion avait duré, enflammée, porteuses de multiples promesses : plus de moyens, aussi bien financiers que techniques, afin de mettre sur pied une opération d’envergure, en plein cœur de ce repère de hors-la-loi, de voleurs et d’agitateurs publics. Il s’agissait de la proche concrétisation d’un des grands projets tenant à cœur au lieutenant général de police, toujours prêt à pousser plus loin l’assainissement de la ville, à en faire une cité paisible digne de son souverain et de la proximité avec Versailles. Ils avaient dressé les grandes esquisses de cette descente historique, et de la Reynie avait continué à travailler sans relâche bien après le départ du membre du gouvernement. Complètement absorbé par les monceaux de documents encombrant son bureau, l’esprit totalement accaparé par d’ambitieuses perspectives, il ne fut ramené sur terre que par l’intervention inconsciente d’un de ses subordonnés, louant les centaines de parisiens ayant le luxe de pouvoir de regagner leur logis à la tombée de la nuit, sans demander leur reste. Un éclair glaçant déchira le brouillard concentré où s’était enfermé le magistrat : il avait promis à son épouse de rentrer pour el dîner. Les nuits passées à l’hôtel de police s’étaient amoncelées ces temps-ci, et dans une volonté d’apaisement, Nicolas avait décidé de, pour une fois, partir à l’heure et dormir en sa demeure. Pas de nuit blanche, pas d’absence ne s’expliquant que trop par elle-même. Et il avait failli. Combien ? Combien de minutes déjà écoulées ?

Cette question avait été des plus obsédantes, alors que son manteau claquait à sa suite, et que Gabriel montait dans sa voiture. Alors que le véhicule se mettait en branle, manœuvrée par un cocher parfaitement sensible à la hâte éprouvée par son employeur, il se maudit intérieurement d’avoir oublié à ce point de scruter l’horloge. Puis, peinant à retrouver son calme, le bureaucrate évalua mainte et maintes fois la distance le séparant de sa maison, la durée nécessaire à rejoindre Florence. Oui, cela irait. Il serait pile à l’heure, sur le fil du rasoir, mais bien là pour tenir sa promesse. Un certain soulagement, mêlé à la tranquillité d’être assuré de ne point manquer à sa parole apaisa son souffle rendu effréné par la brève course l’ayant fait dévalé les marches du bâtiment qui avait bien failli le conserver prisonnier jusqu’à l’aube. Oui, tout se déroulerait bien. Il n’y aurait pas de drame ce soir.

Non loin devant eux, plus personne ne bougeait. Encore un des innombrables accidents enrayant le trafic de Paris, et qui, au sein d’un concert de cris, d’invectives et de disputes, annonçait l’impraticabilité totale de la voie la plus courte menant à son foyer. Un détour apparaissait comme inévitable. Et le temps à peu près rattrapé serait de nouveau perdu. Enfoncé dans la banquette, Nicolas se sentait impuissant, autant que peiné. Florence comptait sur lui, sans nul doute. Cela ne serait qu’un échec de plus ; la liste, plutôt longue, n’en manquait pas franchement. C’était si bête, d’échouer ainsi. Si dommage, alors qu’il savait pertinemment qu’il pouvait rester au bureau tous les soirs, sauf celui-là. Parfois, c’était juste plus fort que lui : la grandeur de la tâche, le plaisir qu’il prenait à savoir que sa signature, son cachet ou ses décisions changeraient la vie des gens, la rendrait meilleure… Cela dépassait l’entendement. Et grignotait sa vie sans laisser la place à autre chose.

Les cloches de Notre-Dame lui apportèrent, par le vent nocturne caressant la ville, l’informèrent de l’étendue du désastre : sept heures venaient de sonner, sans possibilité d’échappatoire. Une résignation coupable habitait désormais l’âme de de la Reynie : se trouver une excuse serait aussi calamiteux que sa maladresse. Nul tour de magie ni miracle ne viendrait à son secours. La partie s’avérait perdue. Sa femme lui en tiendrait rigueur, et avec raison. Comme si le mauvais sort s’acharnait sur leur histoire.

Quinze minutes supplémentaires furent nécessaires pour que le fiacre s’arrête avec un crissement devant la haute porte cochère de sa maison. Prenant à peine le temps de remercier son cocher et de lui souhaiter un bon retour, Nicolas s’engouffra dans l’élégant vestibule occupant une bonne partie du rez-de-chaussée. Il y trouva sa gouvernante, une ronde matrone approchant la cinquantaine, à la gentillesse débordante et aux bonnes joues rouges. D’ordinaire souriante, elle arborait alors une mine embarrassée : visiblement, en ne voyant pas arriver son maître à l’horaire dit, elle s’était fait du souci, demeurant à l’entrée dans l’espoir de voir ce dernier apparaître avant que l’enchantement ne prenne fin. La pauvre, tout comme Gabriel, avait dû se rendre à l’évidence ; le conte de fée avait tourné court. Ils échangèrent un regard, tous deux conscients que l’atmosphère déjà peu joyeuse entre ces quatre murs ne deviendrait que plus pesante.


-Madame a déjà pris place dans la salle à manger, monsieur.

-Merci Jacqueline, lui répondit le bureaucrate, touché par sa sollicitude désolée, en lui laissant son manteau.

Il n’était pas obligé que le dîner se passât mal. Il n’y aurait pas de dispute, ce genre de choses n’arrivait jamais en ces lieux à la paix douloureuse. Non, aux banalités usuelles, ils préfèreraient le silence, chacun retranché dans ses pensées. Le lien brisé battrait dans le vide, comme une amarre tranchée.

Le lieutenant général de police grimpa quatre à quatre les marches de l’escalier menant à l’étage, portant toujours perruque poudrée à deux rouleaux et veste, avant de franchir les derniers mètres le séparant de ladite pièce où Florence l’attendait. Il fallait s’armer de courage, bien qu’il se sentît défait intérieurement : affronter son regard, sa déception masquée, tout cela ne se réalisait pas de gaité de cœur, loin de là. S’armant de courage, Nicolas pénétra dans la salle, découvrant une table dressée, des chandelles à la cire déjà bien entamée par les flammes, et sa femme, assise à une des extrémités de la longue table de bois sertie d’une nappe d’un blanc laiteux. Tout avait été fait pour passer un agréable moment, ou du moins moins qu’à l’ordinaire. Le magistrat osait à peine imaginer les divers stades qu’avait dû connaître Florence, entre patience confiante, désillusion, puis peut-être rancœur muette. Le silence, pesant, devait pourtant être rompu.


-Veuillez m’excuser, mes affaires m’ont retenu plus longtemps que prévu.

Evidence piteuse. Les mots ne venaient pas afin d’agrémenter cette banalité usuelle, si bien qu’au lieu de demeurer debout, Gabriel se glissa sur sa chaise faisant face à celle de sa compagne pour mieux faire quelque chose au lieu de rester planter là, tel un enfant fautif. Il n’y avait pas que toute la longueur du meuble que les séparait alors, cela se sentait. Il y avait dans l’air quelque chose de triste, de contrit. Des excuses, des regards qui se fuient. Il ne restait plus qu’à attendre que leurs serviteurs apportent le repas en scrutant avec application la porcelaine de son assiette. Les plats concoctés par le cuisinier et ses aides serviraient certainement de parade à ce mutisme latent ; un sujet de conversation ne menant à rien de concret, mais offrant au moins la possibilité de faire comme s’il n’y avait aucun malaise, comme si aucun remord ne pointait d'ores et déjà le bout de son nez. Comme si.












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